Assurance-emprunteur : en changer peut rapporter gros

Il peut être judicieux d'opter pour une assurance-emprunteur individuelle aux garanties mieux adaptées à son profil et moins chère qu'une assurance-groupe.

Dans un environnement de crédit immobilier - très - bon marché, la vague des rachats s'amplifie (lire page 24). Selon Crédit Logement, « leur part dépasserait 22 % du total des crédits immobiliers versés en 2015, après 16,9 % en 2014 ». C'est aussi, pour l'emprunteur, une excellente occasion de renégocier l'assurance adossée au crédit… Et de faire des économies substantielles sur la part de l'assurance (voir ci-contre). Il y sera d'autant plus sensible que son poids dans le coût global du crédit s'accroît, « jusqu'au chiffre record de 40 % du coût de l'emprunt d'un couple », s'affole un courtier. Car, si les taux des prêts immobiliers s'affaissent, ceux des assurances stagnent. Faire jouer la concurrence n'est pas aisé, même si la loi a assoupli les conditions de résiliation de ces contrats. Explications.

De quoi parle-t-on ?

Même si elle n'est pas obligatoire, l'assurance-emprunteur est en pratique imposée par les établissements prêteurs pour obtenir un crédit immobilier. Limitée à la durée du prêt, elle garantit le remboursement de celui-ci en cas de décès. S'y ajoutent aussi, le plus souvent, des garanties d'assurance des personnes couvrant les risques d'incapacité de travail, de perte d'autonomie, d'invalidité et plus rarement de perte d'emploi. En fonction du type de contrat souscrit et du profil de risque de l'emprunteur, l'assurance peut peser jusqu'à un tiers du coût global du crédit.

Quels sont les obstacles ?

En principe, depuis la loi Lagarde de 2010, l'emprunteur est libre d'opter pour l'assurance de prêt de son choix. Le banquier ne peut donc imposer son assurance maison si le contrat alternatif retenu présente, selon la loi, des garanties « au moins équivalentes » à celles du contrat groupe. Dans la pratique, les banques sont réticentes et conditionnent souvent un taux de crédit attractif au choix de l'assurance-groupe. De son côté, l'emprunteur, surtout préoccupé par le crédit, peine à comparer les garanties et redoute de manquer de temps pour négocier prêt et assurance.

Que dit la loi ?

Pour contrer ces difficultés, la loi Hamon du 17 mars 2014 (et son décret d'application du 26 juillet dernier) a voulu rendre effectif le principe de la libre concurrence en introduisant une fenêtre d'un an après la signature d'un prêt pour pouvoir changer d'assureur sans aucuns frais ni pénalités. L'emprunteur a donc plus de temps pour faire jouer la concurrence. Seule condition : le nouveau contrat devra comporter des garanties équivalentes à celles du contrat initial. En pratique, il faut adresser sa résiliation par lettre recommandée, de préférence avec accusé de réception, à son assureur, au plus tard quinze jours avant le terme des douze mois.

L'emprunteur peut aujourd'hui mieux comparer grâce à une autre amélioration : le Comité consultatif du secteur financier (CCSF) a défini la liste des critères permettant de vérifier si les contrats d'assurance offrent ou non des garanties équivalentes. Depuis le 1er mai, les banques sont tenues de justifier précisément leur refus en ne se référant qu'à cette liste. Chacune devra ainsi publier sa grille d'équivalences de garanties. « Cela permettra de sensibiliser le client final sur le fait qu'il peut prendre autre chose que le contrat groupe », souligne Jean Orgonasi, président fondateur de BPSIs, courtier grossiste en assurance-emprunteur.

Ce qui va encore changer

A partir du 1er octobre, les candidats à l'emprunt recevront une fiche standardisée d'information sur l'assurance, destinée à faciliter la comparaison des différents contrats entre eux. Cette liste précisera notamment : la définition et les types de garanties proposées, les garanties minimales exigées par le prêteur, la part du capital à couvrir et une estimation personnalisée du coût de l'assurance envisagée. « Il faudrait que cette fiche soit remise le plus tôt possible en amont de l'offre de prêt dès la simulation », estime Arnaud Giraudon, président du courtier en ligne AcommeAssure.com.

Comment s'y prendre ?

Le mieux est de comparer les assurances de prêt avant de négocier le taux du crédit immobilier. « Il est recommandé de vérifier, dès le projet d'achat immobilier, son assurabilité en fonction de son âge et de son état de santé », conseille ainsi Doria Cherkaski, responsable marketing et communication chez MetLife France.

Le particulier peut faire appel à un courtier en crédit ou en assurance, en agence ou en ligne. Il est important de décortiquer les tarifs et les garanties. Pour celles-ci, l'emprunteur veillera notamment à une couverture maximale. Par exemple, la garantie incapacité de travail doit concerner son métier et non pas « toute profession ». Elle doit aussi couvrir les troubles psychiques et les maux de dos, souvent exclus. Attention au piège de la garantie d'invalidité permanente totale (IPT), qui ne se déclenche qu'à partir d'un taux d'invalidité supérieur à 66 %, par rapport à l'IPP (invalidité permanente partielle), qui prévoit la prise en charge partielle de l'échéance du prêt pour une invalidité entre 33 % et 66 %.

Ensuite, il faut demander à son banquier, avant toute négociation de l'assurance, une simulation écrite de l'offre de prêt immobilier. Celui-ci ne pourra plus alors modifier le taux de son crédit en fonction ou non du choix de la délégation.

Peut-on agir en cours de prêt immobilier ?

En principe, l'assurance-emprunteur peut être modifiée même en cours de prêt. Dans la pratique, c'est très difficile. A noter qu'un arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 23 mars dernier a affirmé que les emprunteurs pouvaient résilier leur contrat d'assurance à chaque échéance annuelle pour souscrire un nouveau contrat, en se fondant sur le Code des assurances et non pas sur celui de la consommation. La meilleure solution reste d'intégrer cette négociation d'assurance dans le cadre du prêt.

Qui est concerné ?

La délégation est généralement judicieuse pour les jeunes et jusqu'à moins de 45 ans, et ce d'autant plus s'ils sont non fumeurs et cadres. Elle peut aussi être pertinente pour les sportifs, les professions à risque et en cas de pathologie grave - exclue des assurances de groupe.

À noter

Le taux annuel effectif de l'assurance (Taea) doit être mentionné sur chaque offre de crédit immobilier.

Anne-Sophie Vion, Les Echos

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